Trip grimpe vélo Setesdal Norvège

Activités :
Catégories : récits, mobilité douce
Type d'article : individuel (CC by-nc-nd)
Contributeur : Julien

Un trip à vélo pour grimper dans la vallée du Setesdal, au sud de la norvège. Grande voie sur immenses dalles granitiques très inclinées, petits secteurs de couenne, le tout pimenté de bivouacs en bord de rivière et de baignades. Attention, grimpe très spéciale !

Au programme de juin 2023, un trip vélo grimpe en Italie, au départ de Marseille. Malgré des coups d’oeil répété sur la météo, celle-ci continuait d’indiquer des averses quotidiennes sur 10 jours, dans toute l’Europe du Sud. Mais pas au Nord. Quelques recherches se sont imposées : où faire de la grande voie au nord des latitudes alpines ? Un peu en Bretagne, mais ça reste court et limité en quantité, ou en Ecosse, mais surtout en Norvège. Une, Deux, bam on change les plans. Direction le Sor-Trondelag, cette région du centre-sud de la Norvège, au milieu de pas grand chose.

Train Marseille-Strasbourg
Pause alsacienne et vélo jusqu’à Offenbourg
Train Offenbourg-Emden
Pause et balade le long de la mer du Nord
Ferry Emdenn-Kristiansand
En un peu plus de 48h, on est en Norvège :)

L’idée est d’aller grimper au Setesdal, dont on a acheté le topo, par l’Allemand Hans Weiniger, qui a beaucoup ouvert là-bas. Après une belle mission de 150km avec nos vélos surchargés, nous voilà dans la vallée. On arrivera le lendemain (après un bivouac de bord de rivière qui annonce la couleur des suivants : on va être très très bien) au village central nommé Valle.

On a passé 8 jours sur place avant de rentrer tranquillement. Juin en Norvège, c’est unique. On est dans le sud donc il fait un peu sombre entre 1h et 4h mais ça peut quasiment se faire sans frontale. Ça procure un drôle de sentiment de partir pour 300m d’escalade à 18h. La température est parfaite pour pédaler, grimper, se baigner… On trouve des spots pour bivouaquer au bord des lacs/rivières tous plus beaux les uns que les autres… Les vacances !

Niveau cyclabilité, c’est paradisiaque : soit il y a une voie verte séparée de la nationale, soit on prend facilement des petites routes désertes. Et le reste du temps, les automobilistes et camionneurs ne doublent que s’ils peuvent laisser 2 mètres entre eux et nos vélos :).
La vallée s’y prête bien, les secteurs sont séparés de quelques km seulement : une fois sur place, on n’a pas fait plus de 20 km/jour.

Maintenant, parlons escalade !
Le topo est très bien fait, il y a beaucoup d’infos et tout est en général assez clair. Il est notamment indiqué le nombre de points par longueur !
Il faut 2 brins de 60m sinon vous ne pourrez faire que quelques voies sur les centaines d’ouvertures. La majorité des longueurs fait 60m, et on rappelle en général dans les voies. Les relais sont tout neufs, tous rappelables, bien qu’étrangement conçus : 2 spits avec 2 anneaux très proches qui se touchent quasiment. Apparemment les ouvreurs n’avaient pas entendu parler du cône d’extraction. Mais bon, sur du granit aussi compact, ça a l’air quand même sacrément solide.
De mon avis, il faisait trop chaud pour grimper plein sud en milieu de journée, on choisit l’ombre, le sud si nuageux, ou on part un peu tard dans les voies. Toute façon, il fait pas nuit !

Première voie, en tant qu’habitués du calcaire, on choisit qqch de tranquille pour découvrir tout doucement ces dalles de granit.
Voie Balu, à Bø, 5L, 280m, 5a. Et bien c’est… Intéressant : on devinait à vue de nez que ce n’était pas très pentu, mais là, pour le coup, c’est très incliné. Peu de prises, beaucoup d’adhérence ^^. Dans ce niveau là, c’était confortable, on peut même se retrouver à se redresser pour être juste debout sur la falaise.

Lendemain, voie Einfach schön, à Valle, 12L, 460m, 5c. Encore une fois, de la dalle bien inclinée. Tellement inclinée au début qu’on a fait 100m à marcher sur le rocher, les cordes lovées sur le sac. Après, ça se redresse, et la nécessité de croire en la gomme de ses chaussons apparaît ! On se retrouve dans un océan de granite de tous les côtés, c’est magnifique.
En revanche… on trouvait étonnant de voire que certaines longueurs de 50-60m comptaient 1 ou 2 points : on s’imagine que ça passe par des fissures, on a les coinceurs au baudar, mais en fait non. Donc, on n’est pas dans le dur, mais c’est ni protégé, ni protégeable, c’est assez étonnant.
On part pour la variante Slabstick, en 5c, et là c’est la terreur. Je dirais 10-15m de dalle en adhérence sans une seule vraie prise, non protégés, avec retour vire. Et jsuis dans le dur. A côté, je suis plus à l'aise dans les 6b dalle historiques du Verdon ! On a remarqué à la descente que je m’étais trompé d’itinéraire et qu’il y avait plus simple à droite, mais pas mieux équipé. On arrive à l’avant-dernière longueur ; une traversée de 40m, pleine dalle, en 3+, 0 points. A ce compte-là, je crois qu’on peut dire que c’est engagé. Et étrangement, c’était pas mal penché pour la cot, pas si facile. Refus d’obstacle, on redescend. Merci les relais qui permettent une retraite à chaque longueur :)
Là, catastrophe, on fait un mauvais choix à la descente, je passe une écaille coupante comme une lame de rasoir avec un toit dessous, et je n’étais pas tout à fait dans l’axe : cisaillement de corde, on voit l’âme sur les 2 brins. On arrive à se démerder pour descendre. Verdict en bas : par chance, ça a cisaillé à 10m, on a donc toujours 2x50.

On va se remettre de ces émotions en faisant de la couenne. Et là c’est l’inverse : court, déversant, équipement moderne, cotations sympas. On a trouvé quelques voies magnifiques, à Homme et Haugeskar, en léger dévers de 10-15m, du 4 au 8. Ce qui est top, c’est que le très dur jouxte le très facile, donc il y en a pour tout le monde.

On ne va quand même pas repartir sans aller à Loefjell qui est la falaise phare. Une belle bambée de 300m de D+ à 10-12% nous offre une super baignade sous le village de Brokke. On a trouvé 2 voies qui passent avec nos pauvres 50m. On commence par Norsk Experience + Kaserlei : 2ème longueur, on se remet dans le 5c dalle : et c’est à nouveau un gros shoot d’adrénaline. La grimpe est particulière, ok. si tu fais que ça, tu trouves que c’est 5c, ok. Mais il n’y a toujours pas plus de points ! Un tous les 10m au mieux, indiqués sur le topo. La chute ne fait vraiment pas envie. Ça enchaine mais on laisse beaucoup de points de mental. On arrive au pied du 6a, et il n’y a toujours pas plus de points. Reste-t-il des forces ? Dans les doigts et les bras - oui ; sous les orteils - un peu moins ; dans la tête - plus du tout haha. On descend sans essayer. Faut dire que le 1er point est à peine visible tellement il est loin.

Le lendemain, on part dans Full House en passant par The Beat Goes On : 3L 130m 5c. A faire ! C’était bien mieux : un équipement normal, un peu plus de relief donc un peu plus varié, bref, on termine par une très belle note, sans se faire peur. Le 5c a paru normal. 2 facteurs : il y a des points, et on commence à être habitués au style ! Pile au moment de partir haha.

Bref, si cette escalade en dalle granitique très inclinée et très engagée ne représente pas ce qu’on préfère dans l’escalade, c’était quand même très intéressant et très enrichissant. On peut reprocher le manque de variété, du moins sur ce qu’on a essayé.
On a pu repérer des voies qui suivent des lignes de faiblesse et donc peut-être de la fissure et de la pose de coinceurs, mais au-delà du 6a donc on n’est pas allé voir. Et en termes de missions de plus haut niveau (6sup, 7, sur des falaises impressionnantes et plus verticales), il y a moult possibilités ! De notre côté, la couenne nous a aussi permis de varier, et il y a également du bloc.

Alors oui, c’est pas le Verdon ni Chamonix, mais c’est une magnifique région, des falaises atypiques, et c’était un super trip. L’escalade n’était pas le seul critère de ce voyage, et clairement, tout le reste a été à 10/10 (vélo, dépaysement, calme, rivières, baignades, bivouacs…). Ah, et on était peinards : en 8 jours, on a croisé 2 cordées sur secteurs de couenne et aperçu 2 cordées en GV. Et si vous voulez éprouver vos capacités en dalle, c’est l’endroit !

Commentaires

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bibotte a year ago

Cool, merci pour ton récit ! Bon clairement, vu l’équipement, je ne suis pas prête d’aller là bas :sweat_smile: Bravo !