Petite traversée tranquille autour d'Arrémoulit...
Il est des curiosités que l'on n'ose découvrir : par peur d'être déçu, par peur d'être vu dans un lieu que l'éthique renie, parce qu'on ne peut pas tout voir, tout visiter... Le petit train jaune d'Artouste fait partie pour moi de ces curiosités délaissées, certainement pour les raisons évoquées plus haut ! Un montagnard, un vrai, part du fond de la vallée pour profiter pleinement de son ascension vers les sommets ! Encore que... la voiture qui gravit lacets après lacets la route d'un col.... la télécabine qui nous rapproche d'un beau vallon à skier... pourquoi pas le train qui nous transporte tranquillement à travers tunnels et estives vers un nouvel eden d'altitude !
C'est ce que je proposais le week-end dernier à un petit groupe emmené par Philippe (un ami d'ami devenu ami après quelques escapades pyrénéennes) pour permettre à tout le monde de rejoindre sans trop de difficulté le cirque d'Arrémoulit, ses lacs et son fameux refuge, l'un des plus pittoresques (et donc des moins modernes !) des Pyrénées. Grâce au petit train, que nous partagions avec d'autres touristes parfois plus en adéquation vestimentaire avec une visite de musée ou des emplettes en centre ville que perché à 2000m d'altitude fin septembre, nous découvrions les joies de l'Express le plus haut d'Europe : ses tunnels donc, l'attente aux aiguillages, les coucous des personnes redescendant par une autre rame et les marmottes habituées à ce spectacle.
Une heure plus tard, nous étions à quai, au milieu d'une foule cosmopolite et vite essouflée dès les premières marches menant au barrage du lac d'Artouste. Arrivé là-haut, nous prenions le chemin du refuge et là... plus personne ! La montagne, la vraie, presque sans bruit... à quelques minutes de la fin de la civilisation !
Nous sommes arrivés en fin d'après-midi au refuge tenu désormais par David, un copain de longue date avec qui j'avais jadis passé le diplôme d'Accompagnateur en Montagne. Fin septembre, la saison dans les pattes, les cernes sont bien présentes. Mais le sourire est franc et les retrouvailles sincères. Comme souvent le samedi soir dans les Pyrénées, le refuge affiche complet. Nous sommes prévus au premier service et je propose à Philippe et Jean-Paul, dont le regard porte vers les sommets, une petite balade apéritive vers le col d'Arrémoulit. Pour respecter l'horaire du diner, j'opte pour un pas plus rapide qui nous mène rapidement vers notre objectif du moment. Nous débarquons au col face au premier "Grand" des Pyrénées lorsque l'on vient de l'Atlantique, l'altier Balaïtous et ses 3144m d'altitude. Les nuages et le soleil nous offrent une lumière de fin septembre de toute beauté alors que nous reprenons notre souffle, simplement heureux d'être là au milieu des grands cairns immuables.
Lorsque la compagne de David sonne l'appel de la soupe, nous sommes à nouveau tous ensemble. L'organisation dans l'espace exigu qui sert de salle à manger permet la prise de contact avec les autres convives, entre "pardon, excusez-moi" et "mais, je vous connais vous !". Les discussions vont bon train lorsque la garbure fumante atterrit sur nos tables. Tout d'un coup, un silence complice s'installe entre les tables, comme une respiration avant un "hum"de bonheur simple.
Après le dessert, l'un des meilleurs à mon gout de tous ceux que j'ai pu déguster dans les refuges jusqu'à ce jour, nous laissons rapidement la place aux participants du second service, tous heureux de prendre nos places à table. La fin de soirée se prolonge avec David pour faire le point sur nos vies, deux années après notre dernière rencontre lorsqu'il était gardien du mythique refuge de l'Aigle, dans le massif de la Meije...
Le lendemain matin, la météo est moins bonne que prévu et un bon petit vent du sud fait gonfler la toile du marabou installé près du refuge. Nous décidons de gravir un petit sommet hors sentier, le pic du lac d'Arrious. Je retrouve sans peine les sentes utilisées depuis que l'Homme occupe cet espace et cherche ses bêtes disséminées dans la montagne. Une petite grimpette plus tard, nous voilà avec Jean-Paul et Philippe sur le toit de notre "périple", bien aéré par une ventilation de tous les diables. Il est tant de redescendre et de profiter du long vallon qui ramène vers le célèbre Caillou de Soques. En chemint, nous nous arrêtons près du torrent pour partager notre casse-croûte et tremper nos pieds dans une eau déjà froide.
Le retour à Laruns est presque pénible. Probablement car nous mettons un terme (provisoire certes) à un pur moment de plaisir et certainement aussi par la température anormalement élevée due au vent du sud qui assèche la vallée. Il fait plus de 30°C lorsque je quitte le Béarn en direction du col d'Aubisque pour retrouver, en Val d'Azun, Tifenn, Bertille et les chevaux pour d'autres aventures... que je vous raconterai plus tard ;o)
Stéphane
P.S. : Pour tous ceux qui veulent passer un pur moment de bonheur en montagne dans un cadre grandiose et une ambiance authentique, n'hésitez pas, l'année prochaine, à rendre visite à David au refuge d'Arrémoulit !