Col W du Soreiller ou Col Dalloz : Versant NSunday 13 May 2007

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Weather

Ciel dégagé, le mauvais arrivant en fin de matinée. Iso assez haut mais nuit dégagée.

Conditions

[u]Neige et glace :[/u]
L'avis des derniers passés dans la goulotte ce dimanche (nous), derrière 7 personnes, n'est évidemment pas le même que [url=http://www.camptocamp.org/outings/98786/fr/col-w-du-soreiller-ou-col-dalloz-versant-n]ceux qui l'ont foulé en premier[/url].
Regel à peu près correct, l'accès à la goulotte est en bonnes conditions. En revanche, la neige dans la goulotte est sans aucune cohésion (d'autant plus qu'elle a été bien brassée) posée le plus souvent en très faible quantité sur du rocher. Du très beau mixte!

[u]Rocher :[/u]
Du fait de l'absence de cohésion de la neige dans la goulotte, certaines pierres se révèlent très instables. Un peu de ménage a été fait.

Timing

[u]Global :[/u] 10h refuge-parking
[u]Difficultes :[/u] 4h (rimaye-col) pour les plus longs!

Commentaires personnels

L'ultime goutte de pluie choit sur le pare-brise alors que nous refermons le coffre de la voiture. Le ciel est bouché, l'atmosphère humide. Nanard, François, Chéri-chéri et moi remontons seuls un vallon du Diable que le soleil inonde peu à peu. Au bout de quelques heures de marche, sur notre droite, le couloir Dalloz s'offre à notre vue:
« Putain..! »

Il va sans dire que la langue française recèle de qualificatifs plus raffinés et intelligibles. Mais, sortis de la civilisation et à une altitude où l'on n'hésite pas à réchauffer son sac à viande par ses flatulences, l'épaisseur de notre répertoire lexical était devenue rachitique.

« Putain..! »

Il me semble bien avoir répété ce constat avec emphase et lui avoir ensuite associé un bovidé afin de mieux dénoter à mes compagnons toute la nuance de mon propos.

    « Putain… La vache! »

Songeurs et muets, nous arpentons du regard cette mince faille, qui naît au dessus d'un glacier cyclope dont l'œil rocheux nous toise et vient mourir dans une arête fracturée ocre, fraîchement plâtrée de neige. Au risque d'un torticolis, la tête obliquée vers l'objectif du lendemain, nous poursuivons notre chemin.

Le refuge d'hiver de La Selle atteint, nous nous acquittons des tâches domestiques avec un succès mitigé. En guise d'arrivée d'eau potable, Nanard n'a finalement réussi qu'à réalimenter les latrines. Les doigts engourdis par ce bricolage prolongé dans la neige, il laisse s'échapper de ses mains le réchaud. Ce dernier roule au sol puis chute inopinément du sommet du promontoire, 200m plus bas. Le temps de l'escapade de notre compagnon nous offre une sieste, adossés contre les parois métalliques torrides du refuge d'été.

Nous émergeons d'un demi-sommeil à l'arrivée, non pas du Nanard, toujours affairé en aval dans ses intrigues combustibles, mais d'un guide et de son client. Renseignements pris, ils convoitent la même course que nous.
Le dîner aux chandelles s'acheve. Nous sommes gavés d'un sommeil lipidique par une terrine de canard au foie gras. Nous nous enfonçons dans un nombre indéterminé de strates de matelas moites et antédiluviens. Il nous faut bien pourtant, au milieu de la nuit, nous résoudre à quitter ce cocon que nous commencions à peine à déglacer. Notre éthique nous interdit en effet de contribuer davantage, par notre présence, à dégrader l'écosystème matelassier qui, sans nul doute, doit héberger de nombreuses générations de puces et acariens.

A l'attaque du glacier nous constatons que la ligne est à l'évidence courue. Trois alpinistes supplémentaires sont dans l'approche neigeuse. Ce jour, le Dalloz recevra finalement la visite de quatre cordées. Chéri-chéri et moi constituons la cordée balai.

Chéri-chéri n'est pas au pinacle de sa forme mentale. Je me fais étrangement réprimander pour ne pas avoir choisi de m'équiper sous les séracs. Chéri-chéri semble avoir le cerveau un peu à l'envers des matins anxieux de la reprise d'activité. Le problème est qu'à force de diversification d'activités et d'aléas climatiques, nous sommes fréquemment en reprise d'activité… Mais j’ai la conviction qu’une fois dans l'action, Chéri-chéri sera magnifique, comme (presque) toujours.

Une première longueur en neige, dans laquelle l'effort se réduit à poser les crampons sur les marches creusées par les cordées précédentes, nous mène de la rimaye à l'entrée de la goulotte. C'est ici que débute notre mission d'aménagement et de sécurisation des territoires montagnards, sous la direction du Nanard, professionnel du déblayage de terrain glaciaire détaché temporairement de la Division Départementale de l’Equipement du Puy de Dôme. Je m'applique donc à laisser un friend rouge au relais - ainsi qu'une quantité non négligeable d'énergie dans une vaine tentative préalable de décoincement de l'ustensile. Au dessus de nous, le guide fait généreusement don d'un piton à l'une des rares fissures qui jouxtent la goulotte. Son client, avide de communier, participe lui aussi avec zèle à notre sacerdoce. Il est indéniable qu'après son passage, la goulotte n'est plus encombrée, ni de neige ni de glace. La cordée-balai subit les conséquences de cet entrain : Chéri-chéri et moi récoltons tout ce que l'on défriche au dessus de nos têtes. Neige, glace mais aussi quelques bibelots métalliques, sombrent sans cesse dans cette rainure verticale. Chéri-chéri, apprécie à cette occasion tous les bénéfices de son nouveau casque ajouré: il lui permet effectivement de garder la tête froide. En amont, on s'égosille dans cet entonnoir étroit où la mitraille de neige l'empêche de lever la tête pour repérer la sortie. En aval, dans un bâillement un peu leste, sans lien avec un quelconque manque d'action, ma bouche réceptionne un glaçon bien calibré. Vérification faite, j'ai toutes mes dents. Je m'engage ensuite dans ce mixte de sucre glace saupoudré sur les rochers affleurants, parfois branlants. L'exercice est rafraîchissant, agité et d'une exquise esthétique.

Les nuages ont cependant subitement accrochés les arêtes. La chaleur du rocher s'est dissipée dans un paysage monochrome. Un ciel opalin claquemure les Ecrins. Nos compagnons ne tardent pas à s’échapper de la goulotte. Ils enchaînent rapidement la descente sur l'autre versant. L'écart se creuse entre nos deux cordées. Mon indécision à faire la dernière longueur en tête ce solde par un aller-retour de quelques mètres. Il faut toujours être capable de redescendre ce que l'on a monté disait Tonton Gaston. Lorsque parvient notre tour de déboucher sur l'arête, l'Aiguille Dibona est déjà une flèche fuyante depuis l'angle de vue de nos compagnons, tandis qu'elle n'est encore qu'un vulgaire rocher depuis le notre, bien en amont.

La descente m'est particulièrement laborieuse. Je n'ai ingurgité qu'une madeleine depuis la veille au soir. Ma cuisse gauche est en crise continue de tétanie depuis environ deux heures. La rotule droite montre des signes croissants de faiblesse. Je ne parviens plus à faire la moindre flexion. J'avance tellement vite qu'on pourrait me croire à l'arrêt. Mais les apparences sont trompeuses et je parviens néanmoins à me traîner jusqu'au parking.
Voilà, c'est fini.

Ah… non c'est pas fini.

Chéri-chéri vient présentement de poser sur ma tempe la pointe acérée d'un piolet.

Chéri-chéri voudrait que je confesse la situation honteuse que mon orgueil a subie.

« Tu sais, la descente c'est pas très important d'un point de vue narratif dans un récit de montagne. C'est peut-être pas la peine d'ennuyer les gens avec ça Chéri-chéri..? »

La pointe d'acier me chatouille dangereusement l'arcade sourcilière

« OK, OK!!! Ne t'énerve pas Chéri-chéri… »

Bon…

Euh…

    Hum, Hum…


                      C'est où la police de caractère la plus petite?



                                      Y'en n'a pas..?

[Chéri-chéri ymaportémonsakadohaladécente]