Face N Pic de l'Escalette 1856 m, voie "Mascagnas Pas"
« L’Envers de l’Escalette » c’est sa face cachée, son versant N et sa périphérie qui dévoile un paysage qui se verticalise, défiant nos regards, stimulant notre curiosité.
Ici aussi le «Finestrou» (petite fenêtre en Occitan) Pyrénéiste s’entrouvre pour une pratique confidentielle avec comme seule ambition de mettre à profit l’évidence esthétique que proposent ces futures lignes.
En longeant le kilomètre de la face N (versant Larreix) on découvre des structures d’écoulement des eaux se révélant être des lignes de faiblesses évidentes: rampes, couloirs, goulottes, cheminées, dièdres, niches, et grottes, alternent avec les parties rocheuses compactes: piliers, éperons, dalles. L’Anticlinal dans sa verticalité, livre donc toute ses potentialités.
Avril 2016 avec Roland Lobelson et Patrick Lagleyze, nous avons parcouru la ligne «Mascagnas Pas» (‘AD, 120 m), itinéraire qui inaugure l’aventure de cette attrayante face N.
«Mascagner» (verbe 1° groupe Occitan...), se traduirai par «agir sans délicatesse», de façon bestiale et peu mesuré. Patrick ce jour là, suggérera le nom de la voie, devant mes ancrages qui malmenaient ces touffes de ‘gispet » et de rhododendrons.
La ligne débute vers 1650 m et suit une rampe évidente séparant un pilier à gauche et une face à droite en guise de première longueur (50 m 50°). On laisse cette rampe filer sur la gauche, pour faire relais R1, sous un ressaut rocheux à droite. S’engager dans un bombement arboré à droite du ressaut, relayer sur un arbre R2, après une trentaine de mètre de progression (30 m, 60°/55°). Se faufiler à gauche dans une goulotte étroite, bordée de blocs à gauche, sous la ramure des sapins, qui débouche dans la pente terminale, pour sortir sur l’arête R3, vers 1770 m (40 m 60°/50°).
L’accès depuis le Col de Menté 1350 m vers la vallée de Larreix, s’effectuera soit en traversant la Soulane plein N jusqu’à un petit col sous le Roc des Graoues, à 1590 m, appelé Passade des Graoues» (pente soutenue 40°/45°), ou bien, par un rappel de 50 m d’une brèche sur l’arête, nommée col du Sanglier 1760 m, et son relais chaîné. Compter 1 heure environ depuis Menté.
L’itinéraire techniquement accessible, se prête à merveille pour faire connaissance avec ce versant et son caractère. L’approche étant une course en soi, que l’ascension de la ligne, finalisera.
Henri Fiocco Pyrénéiste glaciériste talentueux et ouvreur hyperactif aussi à son aise avec piolets en main que l’été Kenny Clarke (batteur de Jazz incontournable) avec ses baguettes, avec ses compagnons Karine Ferrand et Jean Luc Fricaud, vont accélérer le cours des choses et contribuer à la vocation de cette face N. Hivers 2017-2018 c’est la «Déferlante Fiocco» qui offrent des itinéraires esthétiquement aboutis aux qualités techniques exigeantes tels : «Mercat à l’Escalette», «la Rampe Décalée» ou «le Chant du Piton». Quand deux bons musiciens de Jazz collaborent, leur production musicale est un régal frisant une certaine quintessence, il en est de même quand Henri Fiocco s’encorde avec Jean Pierre Pujolle guide et secouriste au PGHM de Luchon, le binôme efficace et détonant nous livre «le Petit Ramoneur», «Escalette Express», «les Tontons Givrés» ou «Lilly», itinéraires techniquement engagés.
Petit aparté au sujet de la voie «NTM» ouverte par Paul Marie, Jean Faur et un compagnon dans une atmosphère de convoitise compulsive, dictée par l’entremise des réseaux sociaux corporatistes des « Ténors de la Pioche ». Cette ligne exigeante symbolise quelque peu la valeur de cet aliénant objet de désir que représente pour le Pyrénéiste «escorniflaire» (fureteur en Occ), ces quelques acres de «mau païs» (mauvais pays en Occ) suspendues dans l’ombre de la «barguère» (versant N en Occitan).
Le 20 janvier 2022, découverte de «l’Envers de l’Escalette» pour David Labarre, accompagné d’une cordée collective intergénérationnelle, composée de Benoît, Arnaud, Roland, Patrick et les deux Pierres. Aprés « la Voix du Berger » en face S du Mail de la Pique, David poursuit sa rencontre avec l’Escalette. Moment de partage et de transmission, débordant d’un cadre conventionnel. Rencontrer David Labarre, personnage hors du commun, Pyrénéiste mal-voyant en passe de s’accomplir, révèle ce privilège d’être en possession de ce sens visuel prolongeant le geste. L’accompagner en Montagne dans son accomplissement d’apprenti Pyrénéiste, déborde largement d’un mode relationnel simplement empathique. «Être ses yeux» un court instant, nous rassasie d’humanité, substance essentielle de l’existence. La voie «Mascagnas Pas» sera le support de cette rencontre singulière, dans l’intimité austère de la barguère. La fine équipe passe à l’acte pour une «Conquête de l’Utile» indéniable, en terme de relation humaine.
Il est fort probable que Narcisse Candau guide Fosséen, Michel Fabbro de Eup, la fratrie baroussaise Casteran dans leurs primes jeunesses, ou d’autres anonymes passionnés, nous aient précédés en traînant leurs guêtres dans le coin… Cette chronique n’a que la prétention de consigner les évènements productifs connus du microcosme Pyrénéiste local, relatifs à cette aventure collective de l’Escalette. La potentialité d’autres innovations est toujours de mise, il restera encore de la place pour la créativité des prochains invités de cette montagne.
Aujourd’hui le versant Larreix propose 18 voies de PD à ED, offrant une variété pédagogique de grande amplitude.
Ce canal historique de l’Escalette et ses acteurs, auteurs de ce petit paragraphe Pyrénéiste, se devait d’être divulgué.